Entretien pour le site
decitre.fr   DÉCEMBRE 2005

Après le "très petit" (Les Fourmis), vous abordez un roman par le "très haut" (Le Souffle des dieux). Une façon identique - quoique opposée - d'aborder les grandes problématiques de notre monde, vu comme un microcosme?

Oui, en effet, l'utilisation de ce procédé permet une distanciation. Mon objectif est de trouver de nouvelles manières de regarder l'homme. Comme un entomologiste étudie les insectes... C'est intéressant cette mise à distance. Cela me permet de garder un recul certain vis à vois de son sujet. Et moi, mon sujet favori, c'est l'homme. Enfin, disons que l'homme est au centre de mes réflexions. Et l'étudier en prenant de la hauteur (en utilisant le point de vue du microcosme voire du macrocosme) me permet de m'assurer la distance nécessaire avec mon sujet et me permettre de rester dans le rapport analytique.

Vous alternez fréquemment dans la plupart de vos romans des articles informatifs et schémas narratifs, les un ne s s'entrecroisant parfois que très épisodiquement... D'où vous est venu ce procédé d'écriture?

Cela relève de l'effet de montage cinématographique... Cette technique me permet d'alterner des séquences de récit parallèles. Et puis je ne vous cache pas que cela me permet de créer mon style. Ces insertions de textes informatifs -qui ne font pas avancer le schéma narratifs, mais qui nourrissent toutefois le sujet abordé à ce moment-là -, je les voudrais comme une marque de fabrique. Qu'on se dise, tiens c'est du Werber!

Vous parlez de technique cinématographique. C'est un art qui vous touche?

Vous savez, j'ai une formation initiale de scénariste de cinéma... Donc, oui, c'est certain, le cinéma est un art et une technique qui me parlent. Cela fait vingt ans que j'espère tourner un film: trouver LE sujet, le financement, le producteur, etc. Et je suis en train de toucher au but. Je tourne actuellement un long métrage produit par Claude Lelouch dont le titre est Nos amis les terriens. C'est une aventure passionnante et totalement grisante. Et la réalisation d'un rêve, aussi...

Vous êtes catalogué écrivain de science-fiction, mais vos livres pourraient être rapprochés de livres de philo. Si vous deviez vous vous cataloguer, dans quel catalogue vous rangeriez-vous?

Je choisirais le terme "philo-fiction". En effet, la philosophie a marqué ses limites tandis que la science est ouverte. En fait, mes romans sont de la philo mise en fiction. J'aimerais qu'ils servent de base pour une réflexion.

Vous n'avez jamais, à ma connaissance, écrit d'uchronies, genre phare de la SF. Encore un particularisme...

Je n'ai jamais utilisé ce procédé simplement parce qu'il usés jusqu'à la corde! je n'aime pas reprendre des outils déjà utilisé, voire usagés... Je cherche plutôt àme démarquer et à faire ce qui n'a pas encore été fait.

Vous avez conçu l'arbre des possibles. Pouvez-vous en expliciter le principe?

L'arbre des possibles est une sorte de base de données de scénarios des "possibles" à venir à partir d'un postulat gérée par une association. L'idée d'un arbre des possibles a été formulée pour la première fois dans mon roman Le Père de nos pères. Au tout départ, il s'agissait d'un ensemble de nouvelles, intitulé L'arbre des possibles. Le roman est devenu réalité et j'ai créé l'association pour la recherche des futurs possibles, avec un site pour déposer les idées de futur et découvrir la carte des futurs. Les scénarios utopistes sont une arborescence: chacun, ou presque peut apporter sa contribution. L'objectif est d'essayer de donner une perspective aux événements présents, rechercher la "voie de moindre violence", entrevoir des futurs utopiques ou des mondes meilleurs que l'on n'ose même pas imaginer, et prévoir les grandes erreurs ou catastrophes qui pourraient faire l'humanité se retrouve en grand danger.

Vous êtes un admirateur de Philippe K. Dick. Quels sont les auteurs ou artistes qui vous inspirent?

Les trois auteurs qui comptent pour moi sont: Isaac Asimov, Franck Herbert (l'auteur du de Dune) et en effet Philippe K. Dick (Blade Runner, c'est lui!). Mais je ne peux pas dire qu'ils m'ont inspiré. Ils m'ont davantage donné l'envie de créer mon univers romanesque, comme eux avaient créé le leur. Mon monde n'est donc pas en référence avec leur création. Ils m'ont influencé, certes, mais je me suis démarqué de leurs úuvres pour créer une úuvre qui est mienne. Je tiens beaucoup à marquer cette indépendance de création.

Une ultime question, basée sur le fonctionnement de l'arbre des possibles: "et si vous étiez Dieu?"...

Cela dépend des jours! Je crois que j'essaierai de donner envie aux hommes de maîtriser leur natalité. Le choix ou le pouvoir de réguler la croissance démographique. Oui, voilà. Aujourd'hui, je leur donnerai ce pouvoir. Demain...
 

Entretien réalisé par Lucie Berton, responsable éditorial Internet
Décembre 2005

 


 


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